Compte rendu de notre deuxième voyage à Agadez du 6 au 13 novembre 2004
(Participants: Malcolm BUCKLE, administrateur et Alain DENIS, président).



La préparation du départ

a encore une fois donné lieu à de savants dosages entre le poids de nos affaires personnelles (cela doit rappeler des souvenirs à Jacqueline, Marie-Claude et Dieter, mes accompagnateurs du voyage de février! ) et la quantité de matériel scolaire à faire parvenir sur place. Le 5, nous en étions encore à négocier avec le transporteur le supplément de bagages qu’il pouvait admettre sans frais supplémentaire. Finalement on nous a accordé 3 kg chacun.

Malcolm BUCKLE avait bien voulu m’accompagner pour cette mission, et s’il a cru qu’il s’agissait de tourisme, il aura bien vite déchanté.
Après un vol sans encombre (et sans retard !) nous sommes arrivés à Agadez à midi, où nous accueillaient deux écoliers et leur fameuse banderole, l’inspecteur d’académie qui avait mis sa voiture et un chauffeur à notre disposition pour tout le séjour, puis Rosmane le directeur de l’école, Shahid le président des parents d’élèves et des officiels de la Mairie d’Agadez.
Installation à l’hôtel, puis repas à notre pension habituelle.

Notre mission pouvait commencer.

A 17 heures, était prévue la cérémonie d’inauguration du bâtiment financé par notre association
A notre arrivée dans la cour de l’école, tous les élèves étaient alignés pour nous souhaiter la bienvenue, 400 mains à serrer ! Les parents et les autorités étaient là, musique, chant d’une chorale de filles, et étonnement de Malcolm qui ne s’attendait pas à tant d’enthousiasme.

Après le discours (joint en annexe), nous visitons les deux classes en présence de l’entrepreneur : la construction semble de bonne qualité, conforme à la description du devis.
L’intérieur est propre, l’UNICEF doit prochainement équiper les classes en mobilier.
Puis dans la cour à la grande joie de l’assemblée, nous déballons le matériel scolaire, dont environ 1200 stylos à billes, résultat de la contribution de nos adhérents, des écoles Blanguernon, Noyer Doré et de nos donateurs. C’est une cascade d’ovations à la découverte des cordes à sauter pour les filles, des ballons en cuir pour les garçons et pratiquement une hystérie collective lorsque nous montrons à l’équipe de football les maillots offert par une association de Longjumeau : l’Etoile Sportive.

Puis nous remettons aux autorités présentes des cadeaux offerts par la Mairie d’Antony.
A la fin de cette cérémonie, nous surprenons Malcolm initiant à l’anglais un groupe d’élèves, heureux de découvrir un nouveau visage.

Dimanche

, nous passons la matinée au marché aux bestiaux, le fief de Shahid, lieu où tous les habitants nous connaissent, nos appareils photos sont en surchauffe.
Il faut dire aussi qu’il fait 38° à l’ombre!
Nous rencontrons un ancien élève de notre école, qui est maintenant en 6 ème au collège. Il nous dit combien notre action à Abalan a contribué à sa réussite scolaire.
L’après midi nous allons rendre visite à une vieille amie, la gardienne du musée Barth.
Je la retrouve affaiblie et elle souffre de plus en plus de sa cataracte.

Lundi

je passe ma journée à essayer de faire des photos dans la cour de l’école. Dès que je vise, il y a 10 enfants qui se mettent devant l’objectif.
Malcolm assiste à un cours de sciences naturelles dans la classe de Rosmane: il est impressionné par la qualité de l’enseignement et la participation des enfants, le sujet étant l’appareil digestif et les conseils d’hygiène alimentaire.

Mardi :

matin nous visitons le marché d’Agadez. Odeurs d’épices, couleurs et atmosphère sont au rendez-vous. Nous trouvons du beau tissu pour les boules de Noël de nos bénévoles.
Visite de la case santé : celle-ci se trouve à 100 m de l’école, dispose de deux infirmiers payés par la ville. En l’absence d’eau et de médicament, l’activité se résume à des conseils aux habitants et aux élèves de l’école.
Le soir, Rosmane nous rejoint et nous indique que le chantier de la construction de notre bâtiment a eu des effets très positifs pour le quartier.
Les responsables sur place de ces travaux ont obtenu que le constructeur embauche des ouvriers du quartier. Les retombées économiques, sans être particulièrement importantes, se sont révélées tout de même significatives. Un seul exemple : grâce au salaire versé, un ouvrier très pauvre a pu acheter quelques chèvres et aujourd’hui sa situation s‘améliore.
Notre ami Bachir, guide, nous a proposé d’inclure à titre bénévole l’école dans son circuit de visite et ainsi faire de la publicité pour notre association. Dans la semaine, nous avons su qu’un groupe de touristes s’était rendu sur place.

Mardi toujours :

réunion avec l’inspecteur d’académie. Le sujet principal que nous abordons est l’évolution des effectifs de l’école.
Ces effectifs sont en constante augmentation et risquent de poser des problèmes de logistique à terme. À titre d’exemple, nous apprenons que des familles déménagent pour s’installer dans le quartier, afin de pouvoir inscrire les enfants à l’école d’Abalan, cette école ayant maintenant une excellente réputation.
L’inspecteur nous rassure, et fait état de normes nigériennes : le nombre maximum d’élèves classe est de 60.
Nous évoquons également les problèmes de responsabilités dans l’école. Il nous est confirmé que c’est bien le directeur de l’école qui est responsable de la pédagogie et de l’organisation, par délégation de l’inspection d’académie.
Nous avons confirmation que les bâtiments de l’école sont la propriété de l’école, leur maintenance et l’entretien sont sous la responsabilité des parents d’élèves.
Nous sommes confortés dans notre rôle d’élément déterminant dans la progression et le dynamisme du quartier par notre action et la qualité de l’enseignement dispensé dans cette école.

Mercredi

nous rencontrons le docteur Hassane MAÏGA, responsable de l’antenne UNICEF d’Agadez. Cette rencontre fut l’occasion d’échanger nos points de vue sur la situation de l’enseignement dans la région et sur les problèmes sanitaires. Nous avons évoqué la possibilité de travailler en partenariat sur des projets précis, comme l’eau, la scolarisation des filles et le problème des mariages précoces.
L’après-midi, l’école organise un match de foot pour nous. L’équipe première est fière d’arborer les maillots apportés de France, offerts par l’association l’Etoile Sportive de Longjumeau et remporte le match 2-1 contre les CM1.
Malcolm et moi avions décidé de les récompenser à titre personnel, avec des oranges et de l’eau minérale. Inutile de dire que les enfants étaient fous de joie.

Jeudi matin:

nous rencontrons Madame le Maire d’Agadez, qui nous a remerciés pour notre engagement et nous a assurés de la plus totale collaboration des services techniques de la ville pour l’étude de nos projets futurs.

Vendredi :

jour férié, c’est la fin du Ramadan. Malgré tout, nous organisons une visite à l’école avec le Dr Hassane de l’UNICEF et le directeur du service hydrologie de la ville.
Le sujet : trouver un endroit propice pour creuser un puits.
Nous parcourons la brousse et découvrons des essais de creusage qui n’ont rien donné. Puis on nous montre un puits à proximité de l’école creusé par l’UNICEF, mais qui appartient à un groupement de femmes qui font un peu de maraîchage. Le puits se trouve dans le lit d’un cori (sorte de rivière souterraine) et c’est donc dans ce lit qu’il faut creuser en se rapprochant de l’école.
Les services techniques de la ville sont chargés d’étudier la faisabilité d’un creusement à un endroit à déterminer. Puis avec le bureau de l’UNICEF Agadez notre association va monter un dossier et trouver des partenaires pour réaliser un projet d’alimentation en eau de l’école et de la case santé.

Le bilan de ce voyage est très positif, notre construction est appréciée de tous, elle est de bonne qualité et nos projets futurs prennent une bonne direction.
Notre soutien à cette école semble dynamiser le quartier.

Nous pouvons être fiers de notre association.
Nous devons dès à présent envisager un troisième voyage, compte tenu des délais de préparation. Au cours de l’année prochaine, il n’ y aura pas de nécessité de se déplacer, nous pouvons donc prévoir un voyage vers février-mars 2006.L’intérêt serait de faire participer des adhérents ne connaissant pas encore Agadez.

Alain DENIS




Les impressions de Malcolm :


Avant de donner mes impressions sur ma visite au Niger, il serait plus informatif de les mettre dans le contexte. Je suis un scientifique britannique issu d’un milieu ouvrier. Je suis le premier de ma famille à poursuivre des études au delà de l’âge de 14 ans, et évidemment le premier à aller à l’université et obtenir un doctorat. J’ai pu faire cela grâce à la possibilité qu’avaient des enfants d’un quartier très défavorisé où j’ai grandi, d’entrer dans des écoles de très haut niveau. Je suis donc très sensible à la puissance de l’éducation et je suis convaincu que l’avenir d’une société dépend de l’individu et du potentiel à développer ses capacités par son éducation. Quitte à se répéter, une personne qui sait lire et écrire peut construire une maison, lire la posologie d’un médicament, enseigner, protester, installer un château d’eau autour d’un puits alimenté par un système électrique solaire, conduire un tracteur, cultiver un jardin, transmettre ses idées pour un projet et voter.

Ma première impression était donc un grand soulagement de voir que les gens d’Abalan partagent totalement cette idée, qu’ils poussent activement les élèves à aller en classe et qu’ils soutiennent très fortement toute activité qui a pour but l’amélioration matérielle de l’école d’Abalan.
Je ne veux pas en dire plus sur les conditions de vie de la population d’Abalan, ou même d’Agadez, mais, deux aspects m’ont frappé. D’abord l’extrême gentillesse et le bonheur des gens, malgré la pauvreté et la quantité élevée de handicapés (due aux maladies qui sont devenues rares en Europe : polio, malnutrition, fièvre jaune, diphtérie, typhoïde, ou suite aux accidents, qui en l’absence d’un suivi médical même basique, laissent souvent la victime déformée).

Puis, la lutte incessante contre le désert qui s’incruste de plus en plus et qui a une conséquence immédiate sur la rareté de l’eau.
Alain a décrit en détail notre emploi du temps, je n’y reviendrai pas. Ce voyage m’a permis de comprendre que cette civilisation de Touaregs, créée autour du nomadisme et de l’élevage, est en train d’adopter à cause des sécheresses successives une vie sédentaire et urbaine et qui malgré la dureté de la vie, a choisi le chemin de l’éducation pour ses enfants.
Je reviens de ce séjour enrichissant, avec une détermination féroce d’aider les gens d’Abalan à asseoir leur base de scolarité afin qu’ils puissent se construire une vie libre, où l’ignorance, la pauvreté et l’oppression sociale ou politique n’existent pas.

Finalement, avec Alain, je vous remercie, les amis de l’école d’Abalan pour vos efforts, vos encouragements et pour tout ce que vous avez fait pour aider l’association à réaliser ses projets. J’ai appris quelque chose à Agadez : les élèves de l’école d’Abalan méritent qu’on les aide.

Malcolm BUCKLE



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