Compte Rendu de voyage à Agadez (le quatrième)

Celui- ci s'est déroulé du 4 au 11 mars 2006 Y ont participé : Alain DENIS, président de l'association, Jacques LERNOULD, secrétaire de l'association, et Danièle, Marie-Paule, Jacqueline, Marie-Claude, Catherine.
Merci à Catherine, à Jacques et à Jacqueline pour la rédaction.

Samedi 4 mars :



Rendez-vous chez Alain à 3h30, par -2°. Grâce à nos chauffeurs matinaux, (grand merci à Gilles, Malcolm et Marc) nous arrivons à Orly à 4h. Le décollage prévu à 6h est en fait programmé pour 7h. Enregistrement des 24 bagages, dans le calme, avec toute la gentillesse du personnel. Tout se passe ensuite comme prévu, escale à Marseille, et arrivée après un vol calme à Agadez vers 13h30, avec une température de 40°.
En fin de descente, nous survolons de bizarres constructions, comme des terrains de fouilles archéologiques : De grands enceintes emmurées, sans constructions à l'intérieur. Je comprendrais par la suite qu'il s'agit de la "banlieue" d'Agadez : des terrains clos en attente d'une future construction.
Sur la piste surchauffée, les bagages des partants sont rangés simplement au sol !
Il faut remplir un document pour la police. En face de profession, je note " ingénieur ". La douanière me demande dans quelle spécialité ! Voudrait t'on me garder ?
Après la douane, nous retrouvons les fameux bagages regroupés grâce à une intervention d'Alain. Un bagagiste me demande un petit cadeau pour ce travail. Lâchement, je lui dis que c'est le Président qui se charge de cela ! Je n'ai pas compris ce qui nous attend ...
Toujours grâce à Alain, le pick-up prévu par l'école peut pénétrer dans l'enceinte de l'aéroport, entouré de tous les responsables de l'école et du village. Le douanier aurait bien voulu jeter un coup d'oeil sur le contenu de ces fameux bagages, mais l'attroupement amical le fait renoncer.
A l'extérieur, des enfants et des parents nous attendent avec une banderole au nom de l'association. D'autres nous font des cadeaux, posent des chèches. Sympa, mais en fait ils ne sont pas de l'école ... et aimeraient un cadeau en Euros ...
Nous nous installons. Très bon accueil. Des chambres confortables. Une clim toute neuve. Cela devrait aller ...
On repart vers Abalan. Les quartiers traversés semblent très populaires et ne sont pas très engageants, puis on quitte la route goudronnée pour le sable et la brousse. On longe les fameux terrains clos. On croise des arbres épars chargés de corbeaux ; Mais non, ce sont des centaines de sacs poubelle noirs transportés par les vents... Des chèvres cherchent leur bonheur dans le sable.
On aperçoit de ci de là des cases touarègues, et au bout de quinze minutes c'est l'école !

Et là, surprise : tous les enfants sont alignés, nous acclament, et tous cherchent le contact de nos mains !
Puis nous rencontrons Rosmane, le Directeur, sa femme Adiza, les autres enseignants, les parents d'élèves, le président de leur association et la responsable du centre de santé. Des discours d'accueil sont prononcés. Enfin les élèves débutent un match de football en notre honneur.
Bien fatigués par notre voyage et le changement de climat, nous reprenons la voiture vers notre hôtel.

Dimanche 5 mars :

Le matin, à l'école, ouverture des divers colis (plus de 300 kg); des livres de grammaire ; des vêtements, des outils de jardinage ; du matériel pour les ateliers de couture et de cuisine...3500 stylos , 900 crayons, rassemblés grâce à la générosité de nos donateurs, 1000 préservatifs et des médicaments pour le centre de santé. Tout ceci est réparti entre les différents responsables.
Les gamins arrivent au fur et à mesure, et comme le flux puis le reflux de vagues, envahissent la salle de classe et sont régulièrement repoussés. Globalement, ceux ci semblent en bonne santé et correctement nourris. Il y a même le petit fil du gardien, âgé de 3 jours, non encore prénommé, sous une hutte, une couveuse naturelle. Sa mère est allongée sur une natte, à côté de lui, pour le coup : pas de luxe ni de superflu !
Nous découvrons le " jardin " de Daniel, qui a travaillé dans de rudes conditions pendant un mois (rappelons que celui-ci a entrepris cette expérience à titre personnel). Les courgettes sont en fleur, il y a un peu de salade et des feuilles de radis. Nous constatons que la tâche est gigantesque, mais que cette expérience, si elle devait être poursuivie, nécessiterait une personne compétente sur place, que le problème d'eau n'est pour l'instant pas encore résolu et que les conditions climatiques dans cet endroit posent quelques problèmes : absence d'ombre et vent.

Après midi, marchandages, négociations et achats par le président. Jacques en profite pour prendre des cours de palabres ! Le contrôle qualité est assuré par les filles, Marie Claude, Marie Paule et Danielle en tête. Jacqueline détermine les possibilités de débouchés en France.
Alain, fin palabreur argumente, et, le temps passant , les prix diminuent. Mine de rien, cela fatigue, avec l'ambiance chaude, très chaude, vers les 40°. Jacques assure sa fonction de secrétaire-trésorier-comptable-financier au mieux... et c'est très bien pour nous , ça repose !

Les vendeurs, de toutes ethnies, attendent au portillon de l'Hôtel. Le Président est arrivé! Les affaires vont commencer, et ils sont tous bien informés !

Les bijoux sont de fabrication artisanale. Ce sont les frères ou amis ou voisins qui fabriquent, c'est l'autre frère (ou ami ou voisin) qui commercialise,
Enfin, bref, Alain prend son pied à la discussion, pendant que Jacqueline prend le sien à se faire masser par Marie Claude !

Dès qu'un artisan refuse de faire un effort, les deux négociateurs rappellent l'objectif : Acheter le moins cher possible, pour revendre en France de telle sorte que l'association puisse reverser ses bénéfices à l'école d'Abalan. Je ne pense pas que vendeurs intègrent bien tout cela ...C'est pas grave, nous sommes en Afrique. Tranquille !

Un mot sur la chaleur. Un peu assommante ; alors sieste aux heures les plus rudes. Et dire qu'il neige à Voiron.


Lundi 6 mars :

Quel plaisir, ces petits déjeuners, au frais sur la terrasse.
Puis traversée de la ville avec Rhissa, notre fidèle chauffeur, pour rejoindre la banque et y effectuer un gros change : de quoi payer les artisans ; de quoi payer notre séjour ici ; et enfin, la somme (650 Euros ) allouée par l'association pour l'acquisition de cahiers et de livres.
Puis nous rejoignons Abalan. Aujourd'hui il y a classe.

Une journée débute par le lever du drapeau et l'hymne national chanté par les élèves en rang devant leurs classes respectives. Les cours, puis une récréation à 10h30, et les cours reprennent jusqu'à midi. Les enfants retournent dans leurs foyers, reviennent à 15h30 pour terminer à 18h.

Nous visitons les 12 classes. En fait certaines classes hébergent deux cours, donc deux instituteurs. Tour à tour, nous avons eu droit à la chanson des amis de l'école, à l'empereur, sa femme et le petit prince, rythmé ici à l'africaine...
Dans d'autres classes, les enfants ont, soit récité, soit lu les mots inscrits au tableau.
Nous visitons également les classes d'intégration ( maternelles ), ainsi que le jardin d'enfants.

Tout ceci est très émouvant. Nous ne sommes pas " Monsieur l'inspecteur " !

Après midi, Alain et son secrétaire reçoivent à nouveau des artisans, payent ceux ayant fait affaire, et éconduisent gentiment ceux qui n'ont pas assimilé la règle du jeu.

La chaleur nous assomme toujours. Et on boit beaucoup d'eau (en bouteilles ) et quelques bières locales... On évapore !

Chaque soir, comme chaque midi, nous rejoignons un restaurant, Le Pilier, où la cuisine est proche de nos coutumes, car il ne s'agit pas de prendre des risques comme Daniel qui est revenu avec une dysenterie ! Les serveurs sont très sympathiques, et bien rodés à la bonne humeur d'Alain.

Mêmes remarques quant à la gentillesse des garçons de notre hôtel Tellit.


Mardi 7 mars :

Déjeuner à 7h dans le but de visiter Azel. Dès le second Km, c'est la piste, la brousse et la tôle ondulée. Aucun panneau, sauf une indication " dos d'âne " ! On s'arrête, et là, surprise, c'est un troupeau de chameaux " mono bosse ", pas d'ânes comme indiqué !
Plus loin, un autre panneau en plein désert : Halte Gendarmerie !
Une tente avec 3 géants en uniforme et une auto mitrailleuse qui fait des rondes. Bon accueil.
On repart ; le désert, par endroits des tombes entourées de cailloux alignés ; plus loin, des tas de grosses pierres noires : Des Tumulus ?
Nous croisons ces camions chargés à bloc de matériaux et d'hommes. Puis on aperçoit des palmiers, de la végétation ; c'est l'oasis d'Azel.
Des huttes groupées en village se protégeant des chèvres par des clôtures de branchages.
Un puits avec pompe à pédales ; des enfants, leurs mères nous accueillent. Tout ce petit monde fabrique des paniers. On se sent bien parmi ces gens: rires, photos...
Les poules sont confinées sous du grillage et du carton : principe de précaution !

Puis nous cherchons un jardin, et Rhissa nous dégote un petit paradis avec des parcelles irriguées : citronniers, orangers, manguiers, tomates, salades et mêmes des fleurs.
Des Palmiers doum doum, de la vigne qui circule dans de petits canaux.
Rhissa nous explique les plantes, les fruits de ces arbres. Nous rencontrons une vielle dame, des enfants et un homme dépeçant une chèvre.
Rhissa nous dit qui est cette personne, et à qui appartient le terrain : Akli Joulia, que connaît Alain.

On reprend la route, la piste accidentée, et dans un creux nous sommes bien secoués ; et là, les 3 femmes à l'arrière de la voiture retombent sur leurs sièges : Marie Claude se plaint de sons coccyx, Danielle sent sa tête enfoncée dans son cou ; quant à Catherine, son arcade sourcilière et ses lunettes rencontrent le dossier du siège avant. Ca saigne bien.
On répare et on repart !
Sur la route du retour, quelques villages ronds identiques à celui rencontré à Azel, des bergers et leurs montons, et des marcheurs tenant leur chargement sur le crâne.
En approchant d'Agadez, on trouve dans la brousse de très belles villas entourées de hauts murs et plantés de quantité d'arbres. On dirait que l'eau n'est pas rare pour tout le monde !

En route, Alain nous explique l'histoire d' Akli Joulia ; de mère touarègue et d'un père français, il a fondé ici un hôtel , l'auberge d'Azel, ainsi qu'une agence de voyage faisant découvrir l'Aïr aux touristes. Sa femme, Céline est française. Elle vit depuis 20 ans au Niger.
Il nous propose alors de leur rendre visite. On y reçoit un accueil super, dans un jardin fleuri de toutes parts. Akli nous fait visiter l'hôtel avec ses pièces voûtées. Magnifique !

Il fait bon discuter avec lui et Céline, de l'évolution du Niger, des traditions, des ONG, de l'éducation, des sécheresses de jardinage local et des cultures...
Leurs remarques et leurs conseils nous ont beaucoup aidés.

Début d'après midi semblable aux autres : sieste pour certaines, négociations pour les deux autres...

Puis avec Bachir, visite de la vieille ville d'Agadez, porte du Soudan...Il nous explique les méthodes de construction par des boules de terre cuite crépies d'un mélange d'argile et de fumier.
Certains quartiers sont mieux entretenus, par les filles qui balaient et brûlent les papiers et plastiques.
Les femmes sont allongées sur des nattes juste l'entrée de leurs maisons. Trop d'enfants " réclament un petit cadeau ". Un autre demande même " la charité " !
D'autres, revenant de l'école, et donc mieux éduqués disent simplement " Bonsoir, ça va ? "
Bachir, malgré sa jambe folle, nous fait passer allégrement d'un quartier commerçant, à un autre plus bourgeois, pour finir, après un autre quartier plus populaire, vers une mosquée à l'heure de la prière. Enfin, l'heure d'une des prières, car la première est vers 5h du matin ...

Mercredi 9 mars :



Nous avons rendez-vous à la Mairie avec Rosmane pour y rencontrer le maire adjoint Abdoulaye Hama Dilla et l'adjointe Zara Ibrahim. Nous discutons des réussites de l'école et des projets de l'association, dont le puits. Remerciement réciproques et photos

Nous prenons, toujours conduits par Rhissa, le chemin de l'inspection d'académie. Nous sommes reçus par l'inspecteur d'académie. Les discussions seront de même ordre, mais plus orientés sur les effectifs et l'évolution du nombre d'élèves qui est actuellement de 505.

Puis Rosmane nous emmène sur son terrain. Les briques de Banco sons en cours de séchage. Il nous explique les plans de la future construction.

Retour à l'école où les institutrices nous font de gentils cadeaux.
Le vent se lève, et le sable en profite pour s'immiscer partout. Le disque solaire disparaît vers 17h. L'avantage est la baisse notable de la température.


Jeudi 10 mars :

Au marché Rhissa négocie un prix pour 26 paquets de riz, 1 kilo de pâtes et un cube de bouillon magique . Ce seront les lots pour un concours de rédactions. Le gagnant recevra du riz, les pâtes et le bouillon. Les autres participants seront tous seconds et recevront leur kilo de riz !
Le gagnant est un garçon qui a rédigé un texte sur la vie de sa famille : tous très gentils, sauf la grand-mère plutôt méchante et qu'on oublie de soigner. Cela se termine bien, car elle est maintenant en cure et tout va bien !

Puis les enfants montrent leurs jeux.
Malgré les différences de continents, de climats, de traditions, de conditions de vie, certains jeux sont universels.
A Abalan, le football, le basket, le volley, la marelle, la corde à sauter, les parties de cache-cache ou de colin-maillard (ici surnommé " jeu du lapin ") sont très appréciés.
D'autres jeux nous sont inconnus.

Le jeu des couleurs :
3 tentatives pour deviner les 3 couleurs choisies par l'adversaire.

La conférence :
On fait un trou dans le sable. On y lance des noix doum doum, fruit du palmier du même nom. Celui qui a réussi empêche l'autre joueur de lancer sa noix.

Les 3 positions :
C'est presque une danse. Dans ce jeu rapide, rythmé par les battements de mains, une fillette avance un pied, une autre doit avancer le même en même temps.

Les 2 positions :
Jeu de croche-pied, mais sans agressivité. Très sportif, rappelle certaines figures de hip hop.

Enfin, au pays de la récupération, les jeunes bricoleurs savent tout utiliser pour fabriquer de nombreux objets. Par exemple, des petites voitures avec des boites de conserve vides et aplaties ; les roues sont taillées dans de vieilles chaussures ; une ficelle pour tirer.

Les fillettes jouent avec des poupées en tige de mil.

N'oublions pas les cabrioles dans le sable !

Rosmane explique à Alain le besoin d'une petite classe qui permettrait aux élèves de CM1 de s'isoler pour réviser. Il s'agira d'une paillote en nattes à insérer entre deux bâtiments en dur.
45€ sont nécessaires et aussitôt votés.
C'est une veuve du village qui assemblera les nattes sur les pieux en acacia.

Déjeuner à l'auberge d'Azel. Nous goûtons du chameau ...

Retour au Tellit, où de plus en plus d'artisans se pressent.
Les négociations sont de plus en plus rapides, et les ultimatums du Président sont presque toujours acceptés.

Bachir nous fait visiter la grande mosquée, le palais du Sultan, et son école " pilote " d'informatique.
Pendant ce temps, Alain a pris rendez-vous avec le chef d'antenne de l'UNICEF, le docteur MAÏGA, qui précise l'acceptation de sa direction pour le fonçage du puits, le document officiel d'engagement est remis. Les travaux devraient commencer début avril pour une durée de 45 jours
Un autre rendez-vous a été pris par Alain, discussion avec une entreprise spécialisée dans la construction de châteaux d'eau, un devis nous sera envoyé, Rosmane doit nous faire parvenir un devis concurrent.

Puis nous nous rendons chez le Marabout, tout près de l'école, car celui ci désire offrir au Président un bouc (en fait un chevreau mâle). Mais que faire de ce présent à Antony ? Le cadeau a effectivement lieu, mais Alain avait prévu de faire don de ce bouc au petit-fils du Marabout. Tout s'arrange ! Et personne n'est vexé.
Seule Jacqueline a regretté de laisser l'animal au Niger, elle se voyait déjà le promenant dans le parc Heller.

Vendredi 11 mars :



La journée est consacrée aux ultimes négociations artisanales et à l'emballage des objets les plus fragiles.
En fin de journée, nous retournons à l 'école pour prendre congé des enfants et de leurs instituteurs. Cela ne se passe pas sans une certaine nostalgie.
Nous dînons avec Rosmane et Adiza.

Samedi 12 mars :



Notre vol s'effectue sans incident, et nous passons allègrement d'une température de 40° à un gel bien piquant.

Nous ne sommes pas prêts d'oublier la gentillesse de toutes les personnes rencontrées à Agadez, en insistant encore sur l'accueil du personnel de l'hôtel et du restaurant.

Mais, bien sur, il restera de très bons moments des contacts avec les enseignants et les enfants ; Ces derniers sont vifs, attentifs à nos interventions et à nos jeux. Leurs yeux brillent dès lors que l'on rencontre leurs regards, et ces moments là suffisent à justifier notre mission à Abalan.

Antony, le 16 mars 2006


© Lernejac